Preuve de la contrefaçon et respect des droits de la défense


Le juge ne peut, pour retenir la contrefaçon, se fonder exclusivement sur des rapports établis de manière non contradictoire, peu important que ces rapports aient été soumis à la libre discussion des parties.
Cass. com., 29 janv. 2013, n° 11-28205

Condamnée par la cour d’appel de Paris pour contrefaçon de plusieurs certificats d’obtention végétale, la société « Les Trois Chênes » développe plusieurs moyens fondés sur le respect des droits de la défense pour obtenir la cassation de l’arrêt.

Les premiers arguments visant la procédure de saisie-contrefaçon sont assez classiques puisqu’ils tendent à remettre en cause l’indépendance de l’expert qui assista l’huissier. Le titulaire des droits sollicita un huissier et, en guise d’expert, un « adjoint technique » du GEVES qui est un groupement d’intérêt public chargé d’expertiser les nouvelles variétés. Le demandeur en cassation appuya son raisonnement sur l’existence d’un lien entre l’employeur de l’expert et le titulaire des certificats puisque ce dernier est une filiale de l’INRA qui, par ailleurs, coadministre le GEVES. La chambre commerciale estime cependant que la situation ne révèle aucun « lien de subordination direct » de l’expert à l’égard du titulaire des droits.

En revanche, la chambre commerciale casse l’arrêt en visant les articles 9 du CPC et 6 § 1 de la Convention EDH et applique au contentieux de la contrefaçon le principe du contradictoire en matière probatoire.

En l’espèce, les opérations de saisie-contrefaçon conduisirent en 2006 à la saisie de quelques plants conservés ensuite par le GEVES dans des conditions particulières exposées dans le constat clôturant la saisie-contrefaçon. Par la suite, l’adjoint technique du GEVES (ledit expert) déplaça les plants litigieux sur une bande de terre attenante en prenant soin de faire constater cette opération par un huissier. En 2007, le GEVES établit deux rapports montrant, après un premier cycle de développement des plantes saisies, qu’elles étaient conformes aux variétés protégées. Sur la base de ces rapports, le titulaire des droits obtint la condamnation de son concurrent.

Si la saisie-contrefaçon permet d’administrer la preuve d’une contrefaçon d’une manière non contradictoire, en revanche, les opérations ultérieures doivent obéir à ce principe directeur. Les rapports du GEVES portaient sur des plants conservés dans des conditions différentes de celles décrites par l’huissier ; partant, le défendeur aurait dû être associé aux opérations postérieures.