De l'interprétation d'une clause de non-concurrence insérée dans une licence exclusive de brevet


La clause d'un contrat de licence exclusive limitant la liberté de l'inventeur de concurrencer le brevet concédé s'interprète au regard de l'atteinte éventuellement portée aux revendications du premier brevet par la nouvelle invention prétendument concurrente.
CA Paris, 6 févr. 2013, n° 11/00755

M. M. invente un dispositif de régulation en température d’un local. Quoique salarié de la société S., il détient en propre le brevet afférent, mais accorde à son employeur une licence exclusive avant de partir en retraite. Plus tard, il invente un nouveau dispositif poursuivant la même fin régulatrice. Il propose en vain l’exploitation de ce second brevet à S. et le fait in fine exploiter par un tiers.

C’est alors que S. fait un procès à M. M., en arguant de la violation d’une clause de non-concurrence insérée à l’acte. Celle-ci fait interdiction à l’inventeur « d’exercer toute activité à quelque titre que ce soit qui pourrait concurrencer l’exploitation dudit brevet ». S. s’émeut de l’exploitation par ses propres concurrents du second brevet, qu’elle considère comme tombant dans la portée du premier brevet.

La cour d’appel se livre alors à une analyse technique des revendications des deux brevets en présence. S’agissant du premier, elle estime, après avoir rappelé l’état de l’art, que le brevet ne fait que perfectionner des techniques connues de régulation thermique, notamment par le positionnement particulier d’une gaine.

S’agissant du second brevet, elle constate qu’il n’utilise pas la même technique, à défaut de recourir à de l’eau froide ou chaude pour impacter la température de l’air. En outre, lors de la négociation au cours de laquelle S. envisagea de prendre à licence le second brevet, elle avait formellement reconnu que ce dernier ne constituait pas le perfectionnement du premier brevet.

En réalité, le licencié semble avoir complètement perdu de vue la portée de la clause de non-concurrence. Cette clause interdisait à l’inventeur d’exploiter un brevet concurrent et non de commercialiser un produit reposant sur un autre procédé technique.

La Cour a bien reconnu que les deux brevets s’intégraient à des climatiseurs. Ici, la clause limite la liberté de création de l’inventeur, sans l’empêcher de s’affairer dans le même secteur d’activité que son licencié. Mais, il est vrai, le licencié était un ancien patron.